Dès les premières images, Spielberg montre sa déférence vis à vis du matériau d'origine et son auteur. En aucun cas, il ne veut eclipser la bande dessinée, bien au contraire. La performance capture étonne, épate et s'oublie en quelques minutes tout comme le relief qui joue plutôt les effets de profondeur permettant une immersion totale dans ce qui s'annonce comme une expérience ultime dans le genre (Spielberg + Tintin + perf cap + relief). On a beaucoup écrit sur l'aspect "hollywoodien" de certains passages jugés "too much". C'est oublier qu'Hergé empruntait aux films noirs et d'aventures hollywoodiens de son époque. Plus de 60 ans plus tard, il aurait été régressif de faire comme si le cinéma n'avait pas évolué depuis les années 40, sans chercher à exploiter tout le potentiel de l'histoire (la bataille navale par exemple). Il ne me parait pas incongru d'imaginer que si Hergé avait été nourri du cinéma d'aujourd'hui, il aurait pu tout à fait dessiner la course poursuite à Bagghar et même le combat de grues (je l'ai compris comme un symbole des bateaux qui s'entrechoquent, plus que d'un combat à l'épée qui lui, arrive juste après). J'avais d'ailleurs lu un message intéressant ailleurs qui justifiait aussi la scène pour montrer l'abnégation des deux côtés à se battre face à face, d'homme à homme, mais cachés derrière des machines, contrairement à leurs ancêtres. Scénaristiquement, je ne m'attendais pas à un Indiana Jones bis (et ça ne l'est pas vraiment je trouve), mais à un Tintin, ça me suffisait largement et c'est ce que j'ai eu. Pas plus, pas moins. Après, les idées scénaristiques rajoutées sont pertinentes (le mélange des albums, le rossignol milanais, l'alcoolisme de Haddock au coeur du récit, Moulinsart relié directement à Sakkharine et Haddock). Seule la musique de John Williams ne m'a pas paru entièrement en phase avec le film, j'aurais aimé un truc un peu plus épique par moment, surtout vers la fin. Là c'est limite trop "fin". Le montage est resserré au possible, pratiquant l'ellipse comme Hergé en son temps (pour pouvoir faire tenir ses aventures en 64 pages ?) et en cela très fidèle au rythme trépidant de la bd. Les séquences se suivent à un rythme d'enfer, aidée par une mise en scène libérée des contraintes techniques et en relief, mais sans esbroufe, juste perfectionniste, à la recherche constante de la meilleure idée pour nous mettre émotionnellement dans la peau de ses protagonistes (Tintin qui manque de se faire renverser par des voitures n'aurait jamais eu autant d'impact autrement ). On ne compte plus les idées de raccords, les jeux sur les reflets, les chorégraphies d'action à la limite de la comédie musicale (le combat Haddoque/Rackam rythmé par le parcours de la poudre à canon ). Enfin bref...